samedi 8 janvier 2022

Mon voisin Radilov (Ivan Tourguéniev)

      Voici le cinquième récit des Mémoires d’un chasseur. Le narrateur est sur ses terres de chasse, il tire juste un coup de fusil, et le voilà qui fait la connaissance d’un voisin ignoré et quelque peu énigmatique.



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     À l’automne, les bécasses des bois se tiennent souvent dans les vieux jardins plantés de tilleuls. Dans notre province d’Orel1, on trouve de tels jardins en assez grand nombre. Nos aïeux, au moment de choisir un emplacement pour y vivre, ne se faisaient pas faute de réserver deux déciatines2 de bonne terre pour un verger aux allées bordées de tilleul. Au bout de cinquante ans, tout au plus soixante-dix, ces propriétés, ces « nids de gentilhommes3 » ont peu à peu disparu de la surface de la terre, pourrissant sur place ou vendus pour être démolis, leurs dépendances en pierres tournant aux tas de ruines, les pommiers se mourant et devenant du bois de chauffage tandis que l’on démolissait les clôtures et les haies. Seuls les tilleuls continuaient à pousser à merveille et à présent, entourés de champs labourés, ils rappellent à notre génération étourdie « nos pères et nos frères défunts4 ». Un vieux tilleul est un si bel arbre que même la hache sans pitié du moujik russe l’épargne. Ses feuilles sont menues, ses rameaux puissants s’étendent en largeur de tous côtés, donnant toujours de l’ombre.

     Un jour, chassant la perdrix5 et vagabondant dans les champs avec Iermolaï6, je vis sur le côté un jardin à l’abandon et y portai mes pas. Alors que je marchais à la lisière, une bécasse s’envola bruyamment d’un buisson. Je tirai, et au même instant, un cri résonna à quelques pas de moi : le visage effrayé d’une jeune fille sortit de derrière les arbres et se cacha aussitôt. Iermolaï accourut : « Ne tirez pas ! Un propriétaire vit ici. »

     Avant que j’aie eu le temps de lui répondre, avant même que mon chien n’ait eu le temps de me ramener, d’un air noblement important, l’oiseau abattu, de larges pas se firent  entendre et un homme de haute taille et moustachu sortit d’un fourré et se planta devant moi, l’air mécontent. Je m’excusai comme je pus, me nommai et lui offris l’oiseau abattu sur son domaine.

     — Soit, dit-il en souriant ; j’accepte votre gibier, mais à une condition : vous dînerez avec nous.

     J’avoue que sa proposition ne m’enchantait pas trop, mais il m’était impossible de refuser.

     — Je suis le propriétaire du coin, votre voisin Radilov, vous avez peut-être entendu ce nom, reprit ma nouvelle connaissance. Nous sommes aujourd’hui dimanche, le dîner chez moi devrait être correct. Autrement, je ne vous aurais pas invité.

     Je répondis ce qu’on répond dans de telles circonstances, et lui emboîtai le pas. Un sentier récemment déblayé nous fit bientôt sortir du bosquet de tilleuls ; nous entrâmes dans un potager. Entre de vieux pommiers et des buissons touffus de groseilliers, se montrait l’émail de têtes de chou vert pâle ; des pieds de houblon s’enroulaient autour de hauts piquets ; des plates-bandes se hérissaient de tiges brunes enchevêtrées portant des pois desséchés ; de grosses citrouilles aplaties se vautraient littéralement par terre ; des concombres jaunissaient derrière leurs feuilles anguleuses et empoussiérées ; de hautes orties se balançaient le long de la haie ; à deux ou trois endroits poussaient en touffes des tiges de chèvrefeuille de Tartarie7, de sureau ou d’églantier, vestiges d’anciens parterres. Non loin d’un petit étang rempli d’une eau sale et rougeâtre, on voyait un puits entouré de flaques où des canards barbotaient et se dandinaient d’un air affairé ; tremblant de tous ses membres et clignant des yeux, un chien rongeait un os dans un petit pré dont une vache pie broutait paresseusement l’herbe, sa queue venant parfois fouetter sa maigre échine. Le sentier tourna ; derrière un épais rideau de saules et de bouleaux, nous apparut une vieille maison grise au toit de planches et au perron de guingois. Radilov s’arrêta.

     — D’ailleurs, dit-il d’un air bonhomme et en me regardant droit dans les yeux, j’ai réfléchi, vous n’avez peut-être pas du tout envie d’aller chez moi : dans ce cas…

     Je ne le laissai pas finir, et lui assurai qu’il me serait, au contraire, fort agréable de dîner chez lui.

     — Alors, comme vous voudrez.

     Nous entrâmes. Un jeune gars portant un caftan d’épais drap bleu nous accueillit sur le perron. Radillov lui ordonna aussitôt d’apporter de la vodka à Iermolaï ; mon chasseur s’inclina respectueusement devant le généreux donateur. Le vestibule, où des images variées et fort colorées étaient collées sur les murs portant aussi des cages, nous mena dans une petite pièce : le cabinet de Radilov.   Je retirai mon équipement de chasse et déposai mon fusil dans un coin ; le gars au caftan à longues basques s’affaira à me dépoussiérer.

     — Eh bien, à présent, passons au salon, dit aimablement Radilov ; je vais vous présenter à ma mère.

     Je le suivis. Au salon, sur le canapé du milieu8, siégeait une petite vieille portant une robe brune et un bonnnet blanc, au visage maigre et doux, au regard triste et timide.

     — Maman, je vous présente notre voisin, M.***

     La vieille femme se leva du canapé et s’inclina devant moi sans lâcher un gros réticule de laine filée qui avait l’air d’un sac.

     — Cela fait-il longtemps que vous êtes dans notre région ?

     — Non madame9, c’est récent.
     — Vous avez l’intention d’y demeurer longtemps ?
     — Jusqu’à l’hiver, je crois.

     La vieille se tut.

     — Et celui-là, reprit Radilov en me montrant un individu grand et maigre que je n’avais pas remarqué en entrant au salon, c’est Fiodor Mikhéitch… Allons, Fédia10, montre ton art à notre invité. Qu’as-tu à rester dans ton coin ?

     Fiodor Mikhéitch se leva aussitôt de sa chaise, ramassa sur l’appui de la fenêtre  un violon de piètre allure, saisit l’archet au milieu et non, comme il se doit, par l’extrémité, appuya le violon contre sa poitrine, ferma les yeux et se lança dans une danse, en chantonnant et en raclant les cordes de l’instrument. Il paraissait avoir dans les soixante-dix ans ; sa longue redingote de nankin flottait tristement sur ses membres secs et osseux. Il dansait, tantôt avec de hardies saccades, tantôt l’air mourant et balançant sa petite tête chauve, tendant son cou aux veines saillantes, trépignant et pliant parfois les genoux avec un effort visible. Une voix chevrotante sortait de sa bouche édentée. Radilov comprit sans doute à l’expression de mon visage que « l’art » de Fédia ne me procurait guère de plaisir.

     — C’est bon, le vieux, ça suffit, dit-il ; tu peux aller chercher ta récompense.

     Fiodor Mikhéitch reposa aussitôt le violon sur l’appui de la fenêtre, me salua le premier en ma qualité d’invité, puis s’inclina devant la vieille, devant Radilov ensuite, et il sortit.

     — C’est un ancien propriétaire, reprit mon nouvel ami, il était riche mais il s’est ruiné, et le voilà qui a pris pension chez moi… Et, en son temps, il passait pour le roi des joyeux lurons de la province ; il a ravi deux femmes à leurs maris, il avait ses chanteurs à lui, il chantait et dansait lui-même à la perfection… Mais vous ne voulez pas un petit verre ? Le dîner est servi.

     Une jeune fille, celle que j’avais entraperçue au jardin, entra dans la pièce. 

     — Ah, voici Olga11 ! observa Radilov en tournant légèrement la tête. Je vous demande de l’aimer et de l’estimer12… Eh bien, allons dîner.

     Nous passâmes dans la salle à manger pour nous mettre à table. Pendant ce temps, Fiodor Mikhéitch, dont la « récompense » faisait briller les yeux et rougir un peu le nez, chantait : 


Retentis, tonnerre de la victoire13 !


      Son couvert était mis à part, sur une petite table installée dans un coin, sans nappe ni serviette. Le pauvre vieux ne brillait pas par sa propreté, ce qui faisait qu’on le tenait toujours un peu à l’écart de la société. Il se signa, et poussa un soupir et se mit à manger comme un requin. Le dîner était en effet très convenable et, puisque l’on était dimanche, il ne pouvait être question d’éviter la gelée tremblotante et les meringues14. À table, Radilov, qui avait servi une dizaine d’années dans un régiment de ligne et était allé en Turquie15, se lança dans des récits ; je l’écoutai attentivement, tout en observant Olga du coin de l’œil. Elle n’était pas très jolie ; mais son expression calme et résolue, son large front blanc, sa chevelure abondante et surtout ses yeux noisette, petits mais intelligents, clairs et pleins de vivacité me frappèrent comme ils auraient frappé n’importe qui à ma place. Elle paraissait boire chaque mot de Radilov ; son visage exprimait davantage qu’un simple intérêt, il s’y lisait une attention passionnée. Radilov avait l’âge d’être son père ; il la tutoyait, mais j’avais tout de suite senti qu’elle n’était pas sa fille. Dans le courant de la conversation, il mentionna sa défunte femme – « sa sœur », ajouta-t-il en désignant Olga. Elle rougit aussitôt et baissa les yeux. Radilov se tut et changea de sujet. Durant tout le dîner, la vieille ne prononça pas un mot, ne mangea presque rien elle-même et ne me pressa nullement de faire honneur aux plats16. Il émanait de sa figure une sorte d’attente apeurée et sans espoir, cette tristesse du vieil âge qui cause à celui qui la voit un terrible serrement de cœur. À la fin du repas, Fiodor Mikhéitch se prépara à « célébrer » ses hôtes et leur invité, mais Radilov, après m’avoir jeté un regard, lui demanda de se taire ; le vieux se passa la main sur les lèvres, cligna des yeux, se leva pour s’incliner et se rassit, mais tout au bord de sa chaise. Après le dîner, j’accompagnai Radilov dans son cabinet.

     On peut remarquer chez les gens occupés d’une seule idée ou mus par une seule passion une sorte de caractère commun, une ressemblance de tournure, cela quelles que soient par ailleurs leurs différences de qualités et de talents, ainsi que de situation sociale et d’éducation. Plus j’observais Radilov, plus il me semblait appartenir à ce type d’individus. Il m’entretenait d’économie, évoquait la moisson, la fenaison, la guerre, les cancans du district et les élections prochaines17, il me parlait librement et même avec intérêt, mais voilà qu’il se laissait soudain tomber dans un fauteuil en poussant un soupir et en se passant la main sur le visage, comme un homme épuisé par un dur labeur. Son cœur bon et ardent semblait pénétré et rempli d’un unique sentiment. J’étais déjà frappé de ne pouvoir découvrir en lui de passion ni pour la nourriture ni pour le vin, ni pour les rossignols de Koursk ni pour les pigeons épileptiques18, ni pour la littérature russe ni pour les ambliers19, ni pour les dolmans ni pour les jeux de cartes ou de billard, ni pour les soirées dansantes ni pour les voyages au chef-lieu de province ou aux capitales20, ni pour les fabriques de papier ni pour celles traitant les betteraves à sucre, ni pour les tonnelles décorées ni pour le thé, ni pour les bricoliers poussés à la débauche ni même pour les gros cochers ceinturés sous les aisselles, ces majestueux cochers21 dont, Dieu sait pourquoi, les yeux se dévissent à chaque mouvement du cou… « Quel hobereau est-ce donc là ? », me dis-je. Cependant, il ne jouait pas du tout à l’homme morose et mécontent de son sort ; au contraire, une bienveillance sans prétentions émanait de sa personne, une cordialité toute simple, prête à se lier, de façon un peu vexante, avec le premier venu. À vrai dire, on le sentait aussi incapable de nouer de réels liens d’amitié avec qui que ce fût, et cela pas parce les autres lui étaient indifférents, mais parce que sa vie était pour le moment tout intérieure. En observant Radilov, je ne pouvais absolument pas me le représenter heureux, ni maintenant ni plus tard. Bel homme, il ne l’était pas non plus ; mais son regard, son sourire et tout son être recelaient quelque chose d’extrêmement attirant, recelaient, c’est bien le mot. On avait, il me semble, envie de le connaître davantage et de l’aimer. Bien sûr, le hobereau et l’homme de la steppe transparaissaient parfois en lui ; mais c’était tout de même un excellent homme.

     Nous allions aborder la question du nouveau maréchal de la noblesse22 du district, lorsque la voix d’Olga se fit soudain entendre à la porte, annonçant : « Le thé est prêt. » Nous allâmes au salon. Fiodor Mikhéitch était de nouveau assis dans son coin, entre la porte et la fenêtre, les jambes ramenées modestement sous lui. La mère de Radilov tricotait un bas. La fraîcheur automnale et le parfum des pommes nous arrivait du jardin par les fenêtres ouvertes. Olga s’affairait à verser le thé. Je la regardais à présent avec plus d’attention qu’au dîner. Comme toutes les jeunes provinciales, elle parlait très peu, mais au moins, je ne remarquais pas en elle le désir d’exprimer une haute idée, conjugué à un sentiment torturant de bêtise impuissante ; elle ne poussait pas de soupirs comme sous l’effet d’un trop-plein de sensations ineffables, ne roulait pas les yeux, ni ne souriait d’un air vague et rêveur. Elle avait le regard tranquille et indifférent d’une personne qui se repose d’un grand bonheur ou d’une grande angoisse. Sa façon de bouger et de se mouvoir était libre et résolue. Elle me plaisait beaucoup. 

     Nous reprîmes notre discussion, Radilov et moi. J’ai oublié comment nous en arrivâmes à cette observation bien connue : très souvent, les choses les plus insignifiantes font davantage impression que les choses les plus importantes.

     — Oui, dit Radilov, j’en ai fait l’expérience moi-même. Comme vous le savez, j’ai été marié. Pas longtemps… trois ans ; ma femme mourut en couches ; Je ne pensais pas pouvoir lui survivre ; j’étais terriblement affligé, abattu, mais sans pouvoir pleurer. J’allais et venais, tel un fou. Comme il se doit, on l’habilla et on l’étendit sur la table23, ici même. Le prêtre vint ; les sacristains arrivèrent, se mirent à chanter, à réciter des prières et à brûler de l’encens ; je me prosternai à plusieurs reprises, si j’avais pu verser une petite larme… Mon cœur était pétrifié, ma tête également, j’étais une lourde pierre. Tout le premier jour se passa ainsi. La nuit, le croirez-vous ? je m’endormis, même. Le lendemain matin, je revins près de ma femme – nous étions en été, le soleil l’éclairait fort, de la tête aux pieds. Tout à coup, j’ai vu… (Radilov poussa un soupir à cet instant.) Qu’en pensez-vous ? Un de  ses yeux n’était pas entièrement fermé, une mouche s’y promenait… Je suis tombé comme une masse et, en revenant à moi, me suis mis à pleurer, mais à pleurer : je ne pouvais plus m’arrêter…

     Radilov se tut. Je le regardai, lui, puis Olga… Je n’oublierai jamais l’expression de son visage. La vieille avait posé son bas sur ses genoux et tiré d’un petit sac à main un mouchoir avec lequel elle s’essuyait furtivement les yeux. Fiodor Mikhéitch se leva soudain, attrapa son violon et entonna une chanson d’une voix âpre et rauque. Il désirait sans doute nous égayer ; mais les premiers sons nous firent tous tressaillir, et Radilov lui demanda de se calmer.

     — Du reste, reprit-il, le passé est le passé ; on ne peut pas changer le passé, et finalement… tout est pour le mieux en ce monde, comme l’a dit, je crois, Voltaire24, s’empressa-t-il d’ajouter.  

     — Bien sûr, répliquai-je. On peut certes supporter tout malheur, et l’on peut toujours se tirer d’une mauvaise situation.

     — Vous croyez ? observa Radilov. Après tout, vous avez peut-être raison. Je me souviens de m’être retrouvé à l’hôpital en Turquie, à demi-mort : j’avais le typhus. Bon, notre logement laissait à désirer – c’était la guerre, quoi –, mais, Dieu soit loué, cela aurait pu être pire ! Voilà que soudain, on nous amène d’autres malades : où les mettre ? Le médecin-major court à droite et à gauche : aucune place. Le voici qui arrive à moi et demande à l’aide-médecin25 : « Il est en vie ? » L’autre répond : « Il l’était ce matin. » Le médecin se penche pour écouter : je respire. Notre ami est fort contrarié. « Quelle idiote de nature, dit-il, voilà un homme qui se meurt, il va immanquablement mourir, il ne fait que râler et faire traîner les choses, il occupe pour rien la place d’un autre. » – « Eh bien, me suis-je dit, ton affaire est mauvaise, Mikhaïlo Mikhaïlytch26 !… » Et je me suis rétabli et vis encore, comme vous pouvez le constater. Par conséquent, vous avez raison.

     — J’aurais eu raison de toute façon, répondis-je. Si vous étiez mort, vous vous seriez tout de même sorti de votre fâcheuse situation.

     — Bien sûr, bien sûr… répondit-il en donnant brusquement un grand coup de poing sur la table… Il faut juste prendre une décision… Quel sens cela a-t-il, de rester dans une mauvaise situation ?… À quoi bon tergiverser, traîner en longueur ?…

     Olga se leva vivement et partit dans le jardin.

     — Allez, Fédia, une danse russe ! s’écria Radilov.

     Fédia se leva d’un bond et parcourut la pièce de ce pas élégant et recherché qu’ont les célèbres « chèvres27 » accompagnant un ours apprivoisé, et se mit à chanter :


Quand, devant notre porte28


     Le roulement d’un sulky se fit entendre devant le perron, et quelques instants plus tard, un vieillard de haute taille, large d’épaules et corpulent, l'odnodvorets Ovsianikov29… Mais ce dernier est un personnage si remarquable et tellement original qu’avec la permission du lecteur, nous l’évoquerons dans un autre fragment de ces mémoires. J’ajouterai seulement, en ce qui me concerne, que le lendemain au petit jour, je partis chasser avec Iermolaï, pour rentrer ensuite chez moi ; une semaine après, je repassai chez Radilov, mais je ne le trouvai pas chez lui, pas plus qu’Olga. Quinze jours plus tard, j’appris qu’il avait disparu d’un seul coup, abandonnant sa mère et partant on ne savait où avec sa belle-sœur30. Toute la province fut en émoi et commenta cet évènement, et je compris seulement alors l’expression qu’avait eue Olga durant le récit de Radilov. Son visage ne respirait pas seulement la compassion : il brûlait aussi de jalousie.

     Avant de quitter la campagne, je rendis visite à la vieille Radilov. Je la trouvai au salon ; elle jouait au dourak31 avec Fiodor Mikhéitch.

     — Avez-vous des nouvelles de votre fils ? finis-je par lui demander.
     La vieille femme se mit à pleurer. Je ne la questionnai pas davantage au sujet de Radilov.

     



     




Notes


  1. Lieu de naissance de l’écrivain. En fait : Oriol, et même Ariol : Aigle.
  2. La déciatine faisait un peu plus d’un hectare.
  3. Titre du second roman de Tourguéniev, publié une dizaine d’années après ce texte…
  4. Verset de l’ecténie (note trouvée chez Henri Mongault, qui la cite en grec, et retrouvée en russe), rappel des chrétiens orthodoxes trépassés : Église d’Orient. Voir aussi :
    https://en.wikipedia.org/wiki/Ectenia
  5. L’auteur chasse le gibier à plumes.
  6. Voir le deuxième récit, Iermolaï et la meunière :
    https://blogs.mediapart.fr/m-tessier/blog/220321/iermolai-et-la-meuniere-ivan-tourgueniev
  7. Terme impropre et péjoratif, Tatarie serait plus juste…
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Lonicera_tatarica
  8. Trois canapés et trois tables étaient de règle dans les salons de province (note trouvée chez H. Mongault).
  9. Seulement indiqué par l’enclitique « s », initiale de monsieur ou madame, en russe ancien.
  10. Pour Fiodor.
  11. Dans le texte : Olia, qui en fait se prononce Ola, la mouillure neutralisant la dureté habituelle du « L » russe. C’est le diminutif ordinaire du prénom Olga, Ольга en russe : le signe mou « ь » ayant déjà le même effet sur le « L » qui le précède…    
  12. Façon classique de recommander quelqu’un que l’on présente.
  13. Début de l’ode écrite en 1791 (après une première ode l’année précédente) par le poète Gavriili Derjavine pour célébrer la prise d’Izmaïl en 1790 par les troupes russes commandées par Souvorov,. Mise en musique par Ossip Kozlowski, compositeur d’origine lithuano-polonaise, elle tiendra longtemps lieu d’hymne national officieux en Russie.
  14. Dans le texte : vents d’Espagne. Mes recherches me font conclure aux meringues, là où H. Montgault voyait des pets-de-nonne…
  15. Pendant la guerre de 1828-1829 visant à affranchir la Grèce :
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_russo-turque_de_1828-1829
  16. Ce qui est contraire aux traditions et montre la préoccupation de la vieille femme (note trouvée chez H. Mongault).
  17. Avant les grandes réformes des années soixante – émancipation des serfs et création des zemstvos –, la noblesse élisait dans chaque province la majorité des fonctionnaires administratifs et judiciaires. Ces élections avaient lieu tous les trois ans et donnaient lieu à de nombreuses réunions et fêtes (d’après une note trouvée chez H. Montgault).
  18. Les rossignols de Koursk sont de bons chanteurs, ou de grands bavards. Quant aux pigeons épileptiques, j’avoue mon ignorance.
  19. Chevaux allant l’amble. Tout le passage est loufoque et rappelle Gogol.
  20. Moscou et Saint-Pétersbourg.
  21. Très  en verve, H. Mongault risque ici « automédons ».
  22. Président élu pour trois ans par la noblesse du district, ou même de la province.
  23. Tradition russe.
  24. L’auteur marque ici les limites de son personnage : Voltaire a critiqué au contraire avec ironie cette position dans Candide
  25. Le fameux feldscher très souvent rencontré chez Tchékhov, par exemple…
  26. Pour Mikhaïlovitch, fils de Mikhaïl, Michel.
  27. Garçon couvert d’une peau de chèvre avec les cornes.
  28. Chanson populaire. Nombreuses variantes.
  29. Petit propriétaire indépendant, descendant d’anciens colons. L’arrivée de ce personnage introduit le récit suivant…
  30. Ce remariage était interdit par l’Église d’Orient (note trouvée chez H. Mongault).
  31. Jeu de cartes enfantin. Le dourak, l’idiot, est le perdant.

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