mardi 19 janvier 2021

Le Veau d'or (Ilf et Petrov), chapitre 30

 Alexandre Ibn-Ivanovitch




    Dans le wagon de fret sombre et chauffé, l’air était dense et aussi peu renouvelé que dans une vieille chaussure. Il y régnait une odeur de cuir et de pieds. Koreïko alluma une lanterne de conducteur et se glissa sous son lit. Assis sur une caisse de macaronis vide Ostap le regardait, songeur. Leur lutte avait épuisé les deux combinateurs, et ils accueillaient  avec une sorte de sérénité étatique l’évènement qu’avait extrêmement redouté Koreïko, tandis que Bender l’avait attendu toute sa vie. On aurait même pu croire que cela se passait dans un magasin coopératif : le client demande un couvre-chef et le vendeur jette paresseusement sur le comptoir une casquette velue de la couleur d’un pavé. Que le client la prenne ou pas, ça lui est égal. Et l’acheteur lui-même reste assez froid, il demande juste par acquit de conscience : « Vous en avez d’autres ? », ce à quoi il s’entend répondre : « Prenez celle-ci, sinon il n’y en aura plus du tout. » Et ils se regardent l’un l’autre avec la plus complète indifférence. Koreïko s’affaira un bon moment sous le lit, débouclant assurément le couvercle de sa valise pour farfouiller dedans à l’aveuglette.


     « Hé là-bas, de la goélette ! lui cria Ostap, lassé. Heureusement que vous ne fumez pas ! Demander une cigarette à un radin comme vous serait une vraie torture. Vous ne tendriez jamais le porte-cigarettes, de peur qu’on ne vous en prenne plus d’une, vous fouilleriez longtemps dans votre poche, vous bagarrant pour ouvrir l’étui et en retirer un pauvre cigarette toute repliée. Vous n’êtes pas quelqu’un de bien. Qu’est-ce que ça vous coûterait de sortir la valise ?


     « Et puis quoi encore ? » grommela Koreïko suffoquant sous le lit.


     Il n’avait pas apprécié d’être comparé à un fumeur pingre. Juste à ce moment-là, il retirait de la valise des liasses assez épaisses. La languette nickelée de la serrure égratignait ses avant-bras dénudés. Pour plus de commodité, il se mit sur le dos et poursuivit sa besogne comme un mineur sur un front de taille. S’échappant du matelas, de la balle, des fétus de paille, de la poussière et des saletés tombaient dans les yeux du millionnaire.


     « Ah, ça va drôlement mal, c’est effrayant ce que ça va mal ! se disait Alexandre Ivanovitch. Et s’il allait m’étrangler et prendre tout l’argent ? Rien de plus simple. Il me coupera en morceaux qu’il expédiera à différents endroits, à petite vitesse. Et il mettra ma tête dans un tonneau de chou mariné. »


     Koreïko sentit comme une humidité de caveau. De dessous le lit, il jeta un coup d’œil effrayé. Bender somnolait sur sa caisse, inclinant la tête vers la lanterne ferroviaire.


     « Et si c’était moi qui le… à petite vitesse, à différents endroits ? De façon totalement confidentielle ? » pensa Alexandre Ivanovitch en continuant à sortir les liasses avec effroi.


     Il jeta un nouveau coup d’œil. Le Grand Combinateur s’étira et bâilla affreusement, comme un dogue. Puis il attrapa la lanterne et se mit à la balancer en faisant l’appel :


     « Gare de Khatsépitovka. Descendez, citoyens ! Nous sommes arrivés ! À propos, j’ai complètement oublié de vous le dire : vous songez peut-être à m’égorger ? Sachez que je suis contre. D’ailleurs, on a déjà tenté de me tuer. Un certain Kissa Vorobianinov, vieillard fantasque quoique de bonne famille, ancien maréchal de la noblesse devenu enregistreur de l’état-civil. Nous étions partenaires dans une société en commandite et cherchions notre bonheur dans la somme de cent cinquante mille roubles. Et voilà qu’au moment de procéder au partage de l’argent obtenu, ce stupide maréchal m’a flanqué un coup de rasoir sur la gorge. Ah, c’était tellement vulgaire, Koreïko ! Vulgaire et douloureux ! Les chirurgiens ont réussi à sauver ma jeune vie, et je leur en suis profondément reconnaissant, mais c’était moins une. »


     Koreïko sortit enfin de dessous le lit et poussa les liasses  de billets en direction des pieds d’Ostap. Chaque liasse était soigneusement entourée d’une bande de papier blanc encollée et ficelée.


     — Quatre-vingt-dix-neuf liasses, fit tristement Koreïko. Chacune de dix mille. En billets de deux-cent cinquante. Inutile de vérifier, chez moi c’est comme à la banque.


     — Et où est la centième liasse ? demanda Ostap avec enthousiasme.


     — J’ai déduit dix mille. Pour compenser la somme qu’on m’a volée sur le rivage.


     — Ça, c’est vraiment indécent. C’est pour vous que cet argent a été dépensé. Ne jouez pas les formalistes.


     Koreïko donna en soupirant l’argent manquant et reçut en retour sa biographie consignée dans la chemise jaune à lacets de bottines. Il la fit aussitôt brûler dans un petit poêle de fonte dont le tuyau perçait le toit du wagon. Pendant ce temps, Ostap prit au hasard une des liasses, en déchira la bande et, s’étant assuré que Koreïko ne l’avait pas trompé, la fourra dans sa poche.


     — Et les devises ? demanda, tatillon, le Grand Combinateur. Où sont les dollars mexicains, les lires turques, les livres, les roupies, les pesetas, les centavos, les lei roumains, où sont les lats et les zlotys limitrophes ? Donnez-m’en au moins une partie en devises !


     — Prenez donc ce qu’il y a, répondit Koreïko, assis devant le poêle et regardant les documents se tordre dans le feu. Prenez-les, autrement bientôt il n’en restera rien. Je ne garde pas de devises avec moi.


     — Me voilà millionnaire ! s’exclama Ostap dans un étonnement joyeux. Les rêves de l’idiot se sont réalisés !


     Ostap devint soudain triste. Il était étonné par le côté ordinaire de la situation, il lui semblait étrange que le monde n’eût pas changé au même instant et que rien, rigoureusement rien ne se fût produit aux alentours. Et, tout en sachant que notre époque austère n’admet ni cavernes secrètes, ni tonnelets remplis d’or, ni lampes d’Aladin, il éprouvait tout de même un vague regret. Il ressentit un peu d’ennui, comme Roald Amundsen qui, survolant à bord du dirigeable Norge ce Pôle Nord dont il avait tenté toute sa vie de s’approcher, dit sans enthousiasme à ses compagnons : « Eh bien voilà, nous sommes arrivés. » En-dessous tout n’était que blocs de glace, crevasses et désert froid. Le mystère n’en est plus un, le but est atteint, il n’y a plus rien à faire, il n’y a plus qu’à changer de métier. Mais la tristesse ne dure qu’un moment, car arriveront bientôt la gloire et les honneurs : les chœurs résonnent, les lycéennes en pèlerine blanche font la haie, les vieilles mères des explorateurs polaires mangés par leurs compagnons d’expédition sont en larmes, on joue des hymnes nationaux, on tire des feux d’artifice et le vieux roi serre les explorateurs contre sa poitrine hérissée de médailles et d’étoiles.


     Le moment de faiblesse passa. Ostap jeta les liasses dans un petit sac qu’Alexandre Ivanovitch lui avait aimablement proposé, le prit sous le bras et fit rouler la lourde porte du wagon de marchandises.


     La fête finissait. Les fusées s’élançaient dans le ciel comme des cannes à pêche dorées y attrapant des poissons rouges et verts, un feu sans chaleur sautait aux yeux, les soleils pyrotechniques tournoyaient. Un spectacle pour les nomades avait lieu sur une scène en bois, derrière la cabane du télégraphe. Certains d’entre eux s’étaient assis sur des bancs, d’autres regardaient la représentation du haut de leur selle. Les chevaux hennissaient. Le train spécial était entièrement éclairé.


     — Ah oui ! s’écria Ostap. Le banquet au wagon-restaurant ! J’avais oublié ! Quel plaisir  ! Allons-y, Koreïko, je vous invite, j’invite tout le monde ! Conformément aux lois de l’hospitalité ! Cognac avec un peu de citron, boulettes de gibier, fricandeau aux champignons, vin vieux de Hongrie, vin jeune de Hongrie, champagne !…


     — Fricandeau, dit hargneusement Koreïko, fricandeau et ensuite, en taule. Je ne tiens nullement à m’afficher !


     — Je vous promets un souper paradisiaque sur une nappe blanche, insista Ostap. Allez, allez ! Cessez pour de bon de jouer les ermites, hâtez-vous de boire votre part de boissons alcoolisées et de manger vos vingt mille boulettes de viande ! Sinon, des étrangers fondront sur votre portion et la dévoreront. Je vous arrange ça dans le train spécial, j’y suis comme chez moi, et dès demain nous serons dans un endroit relativement civilisé. Et là, avec nos millions… Alexandre Ivanovitch !


     Le Grand Combinateur avait envie à cet instant de répandre ses bienfaits sur tout le monde, il avait envie que chacun fût gai. Le visage assombri de Koreïko lui pesait. Il entreprit de convaincre Alexandre Ivanovitch. Certes, il ne convenait pas de s’afficher, mais pourquoi se laisser mourir de faim ? Ostap ne comprenait pas clairement lui-même en quoi il avait besoin de voir le contrôleur joyeux mais, puisqu’il avait commencé, il n’était plus question de s’arrêter. Il finit même par le menacer :


     — Vous allez rester assis sur votre valise jusqu’à ce qu’un beau jour la Faucheuse vienne vous passer sa lame sur le cou, c’est ça ? Vous voyez le spectacle ? Dépêchez-vous, Alexandre Ivanovitch, les boulettes sont déjà servies. Ne soyez pas si buté. 


     La perte d’un million avait rendu Koreïko plus malléable et plus réceptif.


     — Prendre un peu l’air, oui, peut-être, dit-il, indécis. Aller dans une grande ville ? Bien entendu, sans ostentation, sans jouer les hussards.


     — Oublions les hussards ! Soyons juste deux médecins des services sanitaires venus à Moscou pour aller au Théâtre d’Art et voir de leurs propres yeux une momie au musée des Beaux-Arts. Prenez votre valise avec vous.


     Les millionnaires se dirigèrent vers le train. Ostap balançait négligemment son sac comme un encensoir. Alexandre Ivanovitch avait un sourire parfaitement idiot. Les passagers du train spécial faisaient les cent pas en tâchant de rester à proximité des wagons, car la locomotive avait déjà été accrochée. Les pantalons blancs des correspondants scintillaient dans l’obscurité.


     Dans le compartiment, sur la couchette d’Ostap, en haut, un inconnu était allongé sous le drap, en train de lire un journal.


     — Allez, descendez, dit aimablement Ostap, le propriétaire est revenu.


     — C’est ma place, camarade, répliqua l’inconnu. Je suis Liev Roubachkine.


     — Écoutez, Liev Roubachkine, ne réveillez pas la bête en moi, allez-vous en.


     Le visage perplexe d’Alexandre Ivanovitch incitait le Grand Combinateur à la bagarre. 


     — C’est nouveau, ça dit le correspondant avec arrogance. Et vous êtes qui ?


     — Ça vous regarde pas ! On vous dit de descendre, alors descendez !


     — Un ivrogne qui vient jouer les voyous !… se mit à glapir Roubachkine.


     Sans rien dire, Ostap attrapa le pied nu du correspondant. Tout le wagon accourut en entendant les cris de Roubachkine. À tout hasard, Koreïko s’était réfugié sur la plate-forme. 


     — Vous vous battez ? demanda Oukhoudchanski. Ça alors…


     Gargantua et le gros écrivain au blouson d’enfant maintenaient Ostap, qui avait eu le temps de flanquer un coup de sac sur la tête de Roubachkine.


     — Qu’il montre son billet ! hurlait le Grand Combinateur. Qu’il montre sa réservation !


     Entièrement nu, Roubachkine sauta de sa couchette sur celle du bas et réclama le chef de train. Ayant perdu contact avec la réalité, Ostap en appelait également aux autorités. Le scandale s’acheva de façon très déplaisante. Roubachkine exhiba et son billet et sa réservation, puis exigea d’une voix théâtrale que Bender en fît autant.


     — Je ne montrerai rien, par principe ! déclara le Grand Combinateur, quittant les lieux en vitesse. J’ai des principes, moi !


     — Resquilleur ! glapit Liev Roubachkine en s’élançant tout nu dans le couloir. Notez bien, camarade chef de train, que nous avons un resquilleur à bord !


     — Où est le resquilleur ? demanda solennellement le chef de train, une lueur de chien courant dans le regard.


     Alexandre Ivanovitch, craintivement caché derrière une avancée de la tribune,  scrutait l’obscurité sans rien pouvoir distinguer. Des silhouettes allaient et venaient le long du train, des rougeoiements de cigarettes dansaient, on entendait des voix dire : « Veuillez me le montrer ! », « Mais je vous le dis, c’est par principe ! », « C’est du houliganisme ! », « N’est-ce pas vrai ? N’est-ce pas exact ? « , « Il faut bien que quelqu’un voyage sans billet, non ? » Les disques-tampons se heurtèrent, l’air des freins siffla au-dessus du sol et les fenêtres éclairées des wagons se mirent en mouvement. Ostap crânait encore, mais les couchettes rayées, les filets à bagages, les chefs de wagon porteurs de lanternes, les bouquets de fleurs et les hélices de ventilation au plafond du wagon-restaurant défilaient déjà devant lui. Il s’en allait, le banquet au champagne et aux vins de Hongrie, le vieux et le jeune. Lui échappant des mains, les boulettes de gibier s’enfuirent dans la nuit. Le fricandeau, le tendre fricandeau dont Ostap parlait avec tant de flamme avait quitté la Source Crépitante. Alexandre Ivanovitch s’approcha. 


     — Je n’en resterai pas là, maugréait Ostap. Abandonner dans le désert un journaliste soviétique ! J’en appellerai à l’opinion publique, Koreïko ! Nous partirons par le premier train ! Nous achèterons toutes les places du wagon international !


     — Qu’est-ce que vous racontez, dit Koreïko, de quel train parlez-vous ? Aucun train ne part d’ici. Le plan ne prévoit le début de l’exploitation de la ligne que dans deux mois. 


     Ostap leva la tête. Il vit le ciel noir d’Abyssinie, les étoiles sauvages et comprit tout. Mais une allusion timide de Koreïko au banquet lui redonna des forces.


     — Il y a un avion derrière la colline, dit Bender, celui qui a atterri pour la cérémonie. Il partira seulement à l’aube. Nous aurons le temps de le prendre.


     Pour y arriver à temps, les millionnaires se déplacèrent d’un large pas de dromadaire. Leurs pieds s’écartaient dans le sable, les feux de camp des nomades brûlaient, traîner une valise et un sac n’était pas si difficile, juste odieusement désagréable. Tandis qu’ils gravissaient la colline en venant du côté de La Source Crépitante, l’aube se levait sur l’autre versant, dans un bruit d’hélices. Déjà Bender et Koreïko se mettaient à courir, craignant de voir l’avion décoller sans eux.


     De petits mécaniciens en manteau de cuir se déplaçaient sous les ailes de tôle, hautes comme un toit. Les trois hélices tournaient à bas régime, ventilant le désert. Des rideaux avec des pompons en peluche flottaient derrière les fenêtres carrées de la cabine des passagers. Le dos appuyé contre une marche en aluminium, le pilote mangeait un pâté qu’il accompagnait de Narzan bue à même la bouteille.


     — Nous sommes des passagers ! cria Ostap, hors d’haleine. Deux billets de première classe !


     Personne ne lui répondit. Le pilote commença à enfiler ses gants à crispins.


     — Il y a des places ? redemanda Ostap en prenant le pilote par le bras.


     — C’est un vol spécial, dit le pilote en mettant la main sur la main courante de l’échelle. Nous ne prenons pas de passager.


     — J’achète l’avion ! se hâta de dire le Grand Combinateur. Faites-moi un paquet.


     — Dégagez ! cria un mécanicien montant derrière le pilote.


     Tournant rapidement, les hélices ne furent plus visibles. Frémissant et se dandinant, l’avion se mit à tourner contre le vent. Les tourbillons rejetaient en arrière les millionnaires, les repoussant vers la colline. La casquette de capitaine d’Ostap s’envola et partit dans la direction de l’Inde à une telle vitesse qu’on pouvait s’attendre à la voir arriver à Calcutta dans trois heures tout au plus. Elle aurait roulé dans la rue principale de Calcutta, sa mystérieuse apparition éveillant l’attention des milieux proches de l’Intelligence Service, si l’avion ayant décollé, la tempête ne s’était pas calmée. En l’air, les flancs métalliques de l’avion brillèrent, et l’appareil disparut dans la lumière du soleil. Ostap courut après sa casquette qui pendait, accrochée à un buisson de saxaoul, et déclara :


     « Les transports refusent de nous obéir. Nous sommes fâchés avec le chemin de fer. Les voies aériennes nous sont fermées. Aller à pied ? Quatre cents kilomètres. Rien d’exaltant. Il nous reste une seule possibilité : adopter l’islam comme religion et voyager à dos de chameaux.


     Koreïko resta muet au sujet de l’islam, mais l’idée des chameaux lui plut. La vue séduisante du wagon-restaurant ainsi que celle de l’avion le confirmèrent dans le désir de faire une balade distrayante en tant que médecin des services sanitaires, sans jouer les hussards, bien entendu, mais tout de même avec un certain style. 


     Les aouls venus célébrer la jonction n’avaient pas encore levé le camp, et les deux voyageurs purent acheter des chameaux non loin de La Source Crépitante. Les vaisseaux du désert leur revinrent à cent quatre-vingts roubles pièce.


     — Ce n’est vraiment pas cher ! chuchota Ostap. Allez, achetons cinquante chameaux. Ou cent !


     — Ne jouez pas les hussards, se renfrogna Alexandre Ivanovitch. Qu’en ferions-nous ? Deux suffisent.


     Les Kazakhs installèrent en criant les voyageurs entre les bosses, aidèrent à attacher la valise et le sac, ainsi que des provisions pour la route – une outre de koumys et deux moutons. Les chameaux se levèrent d’abord sur leurs pattes arrière, ce qui fit s’incliner très bas les millionnaires, puis sur leurs pattes avant, et se mirent en marche le long de la voie ferrée du Turksib. Attachés par des cordes, les moutons trottaient derrière en lâchant de temps à autre de petites boulettes et en bêlant à fendre le cœur.


     « Hé, cheikh Koreïko ! cria Ostap. Alexandre Ibn-Ivanovitch, la vie n’est-elle pas belle ? »


     Le cheikh ne répondit rien. Ayant hérité d’un chameau malingre, il le fouettait furieusement sur son derrière pelé avec une branche de saxaoul.    



     


     





Notice synthétique



     Comme le remarque A. Préchac, l’épisode de la casquette décrit en peu de lignes la fonctionnarisation du système « commercial » soviétique. Je peux à cet égard renvoyer à cette déjà ancienne traduction :

     https://blogs.mediapart.fr/m-tessier/blog/200515/les-bottes-v-choukchine


     D’ailleurs, on a déjà tenté de me tuer : l’explication littéraire vient enfin, après les allusions répétées à la cicatrice qu’Ostap a au coup. Comme les auteurs l’expliquent dans la préface – que je traduirai à la fin, comme cerise sur le gâteau –, ils hésitaient, à la fin des Douze Chaises, sur le sort à réserver à Bender, et le tirage au sort lui fut fatal. Mais le succès prodigieux de leur premier opus leur donna l’idée de le ressusciter…



     Maréchal de la noblesse : représentant élu de la noblesse d’un district. Vorobianinov signifie à peu près Dumoineau.


     En billets de deux-cent cinquante : le texte dit : en billets de vingt-cinq tchervonietz, ce dernier, ancien ducat, valant dix roubles.


     Pour compenser la somme qu’on m’a volée sur le rivage : revoir le chapitre 12…


     À propos des cas de cannibalisme évoqués de façon lapidaire en contrepoint au triomphe des survivants des expéditions polaires : 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Octave_Pavy


     Je ne tiens nullement à m’afficher : comme le fait remarquer A. Préchac, Koreïko est autant dissimulé et introverti que Bender est ouvert et extraverti – d’où son immense supériorité sur le premier, pour le public russe.


     Voir de leurs propres yeux une momie au musée des Beaux-Arts : A. Préchac y voit une allusion à celle de Lénine, ce qui est peut-être un peu osé.


     Ne réveillez pas la bête en moi est un cliché symboliste de l’époque (Blok, Sologoub), indique I. Chtcheglov.


     Note personnelle inspirée de celle d’Alain Préchac : ayant rattrapé Koreïko et obtenu de lui le million convoité, Bender perd son esprit d’à-propos, d’où la scène ridicule avec Roubachkine. Le Veau d’or est un poison pour l’être plein de vie qu’était Ostap. Comme le rappelle A. Préchac : « L’amour de l’argent est en effet à la racine de tous les maux. » (première épître de Paul à Timothée)


     Le ciel d’Abyssinie est peut-être un souvenir de lecture de N. Goumiliov (note d’Ivan Chtcheglov).


     Je garde le « pas de dromadaire » du texte russe, même s’il est plus courant de rencontrer des chameaux que des dromadaires en Asie Centrale et que l’adjectif « de chameau » existe parfaitement en russe : fantaisie des auteurs…


     Les aouls : voir le chapitre précédent et sa notice.


     Rappel : le koumys (ou koumis) est du lait de jument fermenté.

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